Chris Haynes n’est pas aussi connu que Woj ou Shams et pourtant, il a son mot à dire concernant les meilleures personnalités journalistiques du game. Avec son parcours atypique, son naturel, on le place très haut parmi les meilleurs reporters. Il est la définition même de croire en ses rêves car son histoire est unique. Une phrase qui peut paraître bateau mais il a dû cravacher plus que quiconque pour connaitre le succès, surtout dans ce milieu si aisé.
Dans la bataille des scoops, Adrian Wojnarowski, Shams Charania voire Marc Stein font office de cracks. Et pourtant, Chris Haynes fait clairement partie de l’élite. Pour comprendre son succès, prenons la machine à remonter le temps de Marty, pour revenir à l’enfance du journaliste de Yahoo Sports. Certains sont nés avec l’amour de l’école, des bonnes notes, des têtes de premier de la classe. C’est tout sauf la mentalité de Chris le lascar. Petit branleur des quartiers – propos affirmés par lui même – Haynes était comme de nombreux enfants à foutre la m*rde partout où il passe comme il aime le dire. Ses notes en sont témoins, il n’en fout pas une à l’école. Habitant dans un quartier sensible, ce n’est pas pour autant que son père ne lui inculque pas les valeurs importantes. Un moment précis le marquera à vie. Les deux Haynes se promènent entre père et fils lors d’une après midi et ce n’est pas pour aller voir Rafer Alston (natif du coin) sur les playgrounds. Ils habitaient à Fresno et lors d’une journée qui était censée être comme les autres, son père l’emmène en centre ville et plus précisément dans une refuge pour sans abris. Cette après-midi se transforma en rendez-vous mensuel et qui marquera l’ancien journaliste d’ESPN :
« Regarde ce type là-bas. C’était un gamin cool au lycée. Regarde où il en est. Regardez cette fille là-bas. Tout le monde l’aimait. Elle faisait ceci et cela. » Papa Haynes
Aller de manière fréquente dans ce refuge n’était pas une punition. Son père ne savait plus quoi faire de son fils, lui qui aimait par dessous tous les ennuis. C’est une façon de le motiver mais Chris était encore petit et ne comprenait pas pourquoi son paternel agissait de la sorte. Il pensait qu’il voulait que sa vie se termine ainsi. Chris Haynes retrouve le bon chemin, ses notes s’améliorent et prend conscience de la valeur de la vie : « J’ai réussi dans la vie avant tout parce que je suis en vie, parce que j’ai perdu beaucoup d’amis avec la violence des gangs, la drogue, la prison. Donc en premier lieu, j’ai réussi si je suis en vie. » Chris Haynes est parti de très bas, il n’a donc pas des objectifs très élevés dans la vie. Dans son entourage, personne ne réussit, le journaliste de Yahoo Sports n’a ainsi aucune de source d’inspiration. Personne n’a de diplôme dans sa famille mais lui va réussir là où tout le monde a échoué et là encore, son parcours ne ressemble à aucun autre. A l’image d’une grande partie des journalistes qui obtiennent leur diplôme universitaire à 21 ou 22 ans, lui le décroche en frôlant les 30 ans. Durant ces jeunes années, Chris Haynes développe son éthique de travail et rentre dans la vie active de manière inopinée.
On a pu le voir avec Malika Andrews récemment, la plupart des journalistes rentrent dans le moule en une, deux, voire trois années. Il en a fallu bien plus pour le journaliste préféré de Damian Lillard. L’ironie de la situation de l’un des reporters les mieux payés du game ? Chris Haynes n’a aucune vision de devenir journaliste lors de ses jeunes années, il n’a d’ailleurs aucun diplôme dans le domaine. Son projet est de devenir coach et/ou professeur de sports, il est d’ailleurs diplômé. Mais peu à peu, sa mentalité commence à changer. Il débute en écrivant des articles en ligne (gratuitement) et les mois défilèrent, nous sommes à la fin des années 2000. La concurrence est moins rude que maintenant, écrire en ligne à cette époque, ce n’est pas aussi bouché qu’aujourd’hui et il se fait remarquer très vite. Slam Magazine lui prodigue un conseil précieux : aller dans une ville avec une franchise NBA. Depuis son diplôme, Chris Haynes n’a toujours aucun job et décide lui et sa famille, de partir à Portland. Une nouvelle vie commencera.
Désormais âgé de 27 ans, il devait subvenir aux besoins de sa femme et ses 4 enfants. Le seul employeur qui a daigné lui donner un job, c’est pour un emploi dans la sécurité. La difficulté de la vie l’avait encore frappé. Toutes ses années d’études et d’investissement pour ne finalement pas trouver sa voie. Mais il n’abandonne pas. Pendant la journée, Chris Haynes trouve un job d’agent de sécurité et le soir, le journaliste couvre l’intégralité des Blazers, y compris les matchs à l’extérieur. C’est ce qu’on appelle un beatwriter et encore aujourd’hui, ils sont nombreux. Les semaines défilent en tant que journaliste freelance et il décroche le sésame. L’insider des Blazers obtient enfin des accréditations mais n’est toujours pas payé pour son taff de journaliste. Une vie horrible d’avoir des diplômes, n’être pas payé en conséquence et avoir ne serait-ce que le smic pour nourrir sa famille. Une réalité qui frappe des milliers de personnes. En plus d’être frustré et déprimé avec le peu d’heures de sommeil entre ses « deux emplois ». C’est malheureusement les grands maux et le rite de passage obligé chez beaucoup de journalistes, qui essayent par dessus tout de percer. Mais dans le même temps, il relativise. Il a une famille, un toit, un job, peut discuter avec des stars NBA. D’où il vient, n’avoir qu’une de ces choses est déjà un miracle :
« Je ne visais pas haut. Tout ce que je voulais, c’était un appartement, une voiture et un travail. Et je l’ai fait. J’ai battu les attentes. »
Durant son séjour à Portland, sa relation avec Damian Lillard est spéciale, ainsi qu’avec tous les autres joueurs de Portland de l’époque. On peut le voir à travers les années, les joueurs détestent les journalistes, du moins en partie. Répondant agressivement, parfois avec un mot (salut KD), ou se faisant même allumer sur twitter. La question se pose donc, pourquoi cela n’arrive pas à Chris ? Il y va de son explication : « Une grande partie de ce business c’est la relation et la façon dont tu interagis avec les personnes avec qui tu parles. Beaucoup de gens n’ont pas de compétences en relation où ils peuvent tenir une conversation. Ils veulent juste mettre un micro au visage et poser une question. Mais ça ne marche pas comme ça. Dans ce business de « breaking news », tu ne peux pas seulement, demander, demander, demander. » Chris B. Haynes n’hésite pas à le dire, venant de quartiers sensibles, comme une grande partie des joueurs, il sait comment leur parler, et allier professionnalisme et naturel, lui a permis de se faire un nom. Le contact ne lui vaut aucun effort et ça fait la différence. Quincy Pondexter, joueur de l’époque aux Blazers, raconte :
« Il est quelqu’un avec qui tu peux t’asseoir et t’amuser, parler de basket. Il n’est pas vraiment dans la lumière car il est partial. Il est juste vrai dans tout ce qu’il fait. »
Le travail paie enfin. Il ne bosse plus « gratuitement » et se fait engager par Comcast SportsNet Northwest (devenu NBC) pour être payé 32 000 dollars l’année. Une coquette somme pour lui : « J’étais l’homme le plus heureux de Portland. Je n’ai jamais eu autant d’argent. Je vivais avec l’aide de l’état mec. J’avais l’impression d’avoir réussi. » Après ce séjour à Portland et conscient que sa cote est en train de monter, il débarque à Cleveland en 2014. Il sait qu’à ce moment, Lebron James est LA star du monde avec un Kobe Bryant sur la fin, son objectif est clair et établi. Faire parler de lui, toujours en restant droit et en ne prenant pas de raccourci. Il veut rapporter toutes les histoires possibles, pour que ESPN le remarque et le mentionne aussi souvent que possible. ESPN est le GOAT du journalisme, c’est l’élite de l’élite. La chaine numéro une, le seul site au monde qui parle de tous les sports (et le plus visité à fortiori), du championnat pro, à l’université en passant par le lycée. Rien est mieux encore aujourd’hui. Pour les fans « modestes », relisez bien la date écrite plus haut. En 2014, il se passe quelque chose d’énorme. C’est le grand retour de Lebron James à Cleveland, Chris sait ainsi ce qu’il fait et ne s’en cache pas :
« Couvrir les Cavs, j’ai couvert principalement LeBron. J’ai pris le poste [avec le Cleveland Plain] lorsque LeBron a annoncé qu’il revenait. Nous savions à quel point LeBron était influent: mon article a fait appel à un journaliste de LeBron parce que nous ne pourrions jamais avoir une couverture suffisante de LeBron. C’était mon gars, Joe Vardon, mais cela en est arrivé au point où je pense que ce n’était pas la bonne solution parce que lui et moi nous nous sommes parfois embrouillés pendant mon contrat là-bas – et c’est mon gars, mon très bon ami – parce que LeBron est les Cavaliers. Je n’ai pas aimé l’arrangement quand j’étais là-bas, mais tout a fonctionné. »
Chris B. Haynes s’est enfin fait un nom. Il est désormais kiffé par tout le monde et lorsque Kevin Durant signe à Golden State, ESPN le veut, oui ESPN, le média qui le fait tant rêver depuis des années :
« Oh putain oui, c’est comme les joueurs qui essaient d’être pros, pour aller en NBA. ESPN c’était le but ultime. C’était la NBA pour moi.
Quand j’étais à Portland, j’annonçais les news de Portland, et ça faisait du buzz. Mais personne au niveau national. Les gens ne se soucient pas de Portland et des Trail Blazers comme ils se soucient de LeBron. Quand j’étais à Cleveland, c’était mon moment sur la grande scène. Quand j’étais à Cleveland, mon objectif était de faire en sorte que [ESPN] me mentionne le plus possible. Je voulais choper chaque histoire, je voulais dominer et écraser tout sur mon chemin, et je voulais en arriver au point où ESPN devait tellement me créditer que c’était du genre : «Bon sang, pourquoi ne pas embaucher ça?»
Le grand jour est ainsi arrivé pour Chris et les joueurs en rigolent encore. Les Cavaliers et les Warriors ont été la grande rivalité et certains pensent que le nouveau journaliste d’ESPN a été envoyé en mode espion par Cleveland. Couvrir cette rivalité a été un de ses gros faits d’armes en connaissant les coachs, les joueurs et le management tant des Dubs, que des Cavs. Il peut se permettre ainsi beaucoup de choses pendant les interviews, ce que ne peut pas faire 99.9% des autres reporters. Beaucoup essaient de se faire un nom, le sien est déjà établi et les stars telles que Stephen Curry, Lebron James ou Draymond Green, savent que le natif de Fresno ne fera pas la course au « clic ». Ainsi, ils se livrent plus facilement. Tout n’est pas facile pour autant. Quand il était journaliste freelance, la difficulté est grande de travailler seul, parfois isolé. C’est un peu le mode smash brosh activé. Seul contre tous. ESPN est plus une usine, beaucoup de monde, beaucoup de voix, c’est plus facile mais parfois usant. S’habituer a mis du temps car il faut répondre à énormément de monde. Le plus grand kiff pour lui aura été de donner des interviews 1 vs 1 avec toutes les stars NBA ou presque. Il avait ainsi cette plateforme, la réputation pour lui, Chris B. Haynes voulait passer au stade supérieur.
Sources:Free Agent reporter @ChrisBHaynes reaches agreement w/yahoo sports as Senior NBA insider, Will help build their NBA team.More coming
— Damian Lillard (@Dame_Lillard) September 5, 2018
Chris B. Haynes a annoncé plus d’une fois la signature d’un joueur mais cette fois ce sera le contraire. La superstar Damian Lillard annonce l’arrivée de son ami à Yahoo Sports. Après avoir perdu un poids lourd comme Shams Charania, il fallait bien le remplacer, voire en mieux. De Chris Herring à Zach Harper et Marc Stein, sans oublier Alex Kennedy en passant par Ramona Shelburne et Ros Gold-Onwude, le milieu journalistique a vu la « nouvelle » bombe. Outre son RIB qui risque d’exploser, l’ancien journaliste d’ESPN est plus responsabilisé, c’est lui le boss, il gère son équipe, propose son contenu. Une fois encore, il dépasse les attentes et on a vraiment hâte de savoir ce que lui réserve l’avenir. Il a déjà montré son potentiel, par exemple en se dirigeant vers la WNBA en plus de la NBA, preuve de son émancipation contrairement à ESPN.
Une bien belle histoire qu’est Chris B. Haynes et on est persuadé qu’elle n’est pas finie. Toujours droit, direct, le travail a fini par payer. Beaucoup auraient et ont abandonné leur rêve, quand bien même la trentaine les guettait. Avec une famille à nourrir, il a su faire bien plus que les autres en limitant son sommeil non pas en heures mais en minutes pour réaliser son rêve. Il n’est malheureusement pas une star NBA et son histoire n’est pas relatée mais elle le devrait tout autant que les Allen Iverson, Lebron James et consorts. Encore derrière les Woj et Charania, en terme de notoriété, il n’en est pas moins aussi solide. Les vues ne font pas tout. Ce n’est que le début de sa carrière et on a hâte de voir le prochain chapitre de son oeuvre.
Sources : ESPN, NBC, Fresnobee, Yahoo Sports, Hoopshype, awfulannouncing, Thecomeback, Blazersedge
Evènements notables :
– Membre de l’Oregonian, Cleveland Plain Dealer, Orlando Sentinel, Kansas City Star, Miami Herald, Palm Beach Post, Sun Sentinel, Dallas Morning News, ESPN.com, Yahoo.com, CBSSports.com, NBCSports.com, Blazersedge.com, Hoopsworld.com et une foule d’autres médias.
-Couverture des athlètes de la Multnomah University pour les nouvelles de l’école
– Privilégié d’avoir couvert les finales NBA (2x) a finale de la NBA deux fois, les World Series, et un tournoi régional NCAA (chez les hommes).
– Membre de la Pro Basketball Writers Association (PBWA) et de l’association nationale des journalistes noirs
– Passé par le lycée Edison (1999)
– S’est occupé d’écrire pour le basket-ball et a reçu une bourse complète de basket-ball pour jouer à l’Université Fresno Pacific dans laquelle il a joué deux saisons.
– A fréquenté l’Université d’État de Fresno pendant deux ans où il a obtenu un diplôme en kinésiologie avec une spécialisation en éducation physique.
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