En NBA, la tragédie et ses méfaits s’expriment régulièrement sous plusieurs de leurs aspects. Lorsqu’une franchise se retrouve dénuée après le départ de son pilier (coucou LeBron et KD), lorsqu’un joueur se retrouve expédié ailleurs de manière révoltante, lorsqu’un autre tombe dans l’alcoolisme ou la drogue et qu’il gâche son talent, et parfois même, de la plus radicale et dramatique des manières, lorsque la mort intervient (RIP Drazen & Len). Au sommet de la liste des tragédies de la balle orange, se situe un joueur dont la planète basket pleure les plus belles heures chaque jour de son quotidien. Un joueur adoré par tous les fans ayant révolutionné son époque par son caractère et son jeu absolument dantesque. MVP 2011, ce joueur n’est autre que Derrick Rose, l’un de ceux pour qui on donnerait n’importe quoi pour que les blessures n’existent pas. Ces satanés pépins physiques auront détruit la carrière du fabuleux talent de Derrick et petit à petit, elles auront presque eu raison du meneur. Mais c’était sans compter sur l’incroyable combativité du plus jeune MVP de l’histoire, qui, après avoir touché le gouffre, a su renaître de ses cendres dans le Minnesota, en se réinventant complètement. Bon shooteur et prolifique en sortie de banc des Wolves, (18 points et 4 passes de moyenne en 27 minutes, à 50% au shoot et 37% de loin) Derrick a peut-être enfin dit au revoir à ses déboires et c’est à Detroit qu’il compte continuer sur sa bonne lancée pour une fin de carrière digne de ce nom. Et en parlant de tirer un trait sur le passé, Rose s’est lâché dans son autobiographie « I’ll Show You » (en vente le 10 septembre) co-écrite avec Sam Smith, en revenant sur son triste passage aux Knicks pour tacler Phil Jackson et Melo notamment.
Nous sommes le 22 juin 2016, veille de la très attendue 70e Draft de la NBA. Ce soir là, deux franchises vont faire parler d’elles autrement que par des rumeurs avec des rookies ; ce soir là, l’enfant de Chicago quitte le pays pour rejoindre le plus gros marché de la NBA via un transfert contre José Caldéron, Jerian Grant et Robin Lopez ainsi qu’un 2nd tour de Draft. Derrick Rose, sans cesse victime de pépins physiques, est transféré contre trois frites et une sauce andalouse en vue de couper les ponts d’un mariage intense mais chaotique entre le meneur et sa ville d’enfance, Chicago. Avec le MVP 2011 arrivant à New York, la Big Apple est on fire : comptant Phil Jackson, Carmelo Anthony et Joakim Noah dans leurs rangs, comment Derrick ne peut-il pas revenir au top de sa forme et aider les Knicks à squatter les sommets, qui peut s’appuyer sur un effectif extrêmement talentueux? Le script était bien trop beau pour être vrai. Malheureusement, les événements ne vont pas faillir à la réputation des Knicks et la saison 2016-2017 ne sera qu’un naufrage de plus parmi les multiples saisons désastreuses de la Big Apple. Très enthousiaste et revenchard lorsqu’il rejoint New York, la réalité va vite rattraper Derrick, qui se rend très rapidement compte qu’il n’ira pas loin avec ce collectif. Au cours de son autobiographie, le triple All-Star revient longuement sur son épopée à New York et raconte les mésaventures de sa péripétie, sans omettre de lâcher quelques punchlines envers Phil Jackson et Melo :
“Avec la manière dont Phil avait parlé, avec Joakim et Carmelo, je pensais vraiment qu’on allait faire quelque chose. Mais quand est arrivé le moment de jouer au basket, j’ai tout de suite su qu’on était à chier. J’ai fait avec sur une soixantaine de matchs, mais je peux vous dire directement que ce n’était pas la saison que j’attendais. Beaucoup de priorités différentes. Melo est là. Vous savez comment il joue. Vous ne pouvez pas changer ça. C’est ce que j’ai réalisé en étant là bas. Et c’est un super mec ; j’adorais être avec Melo. Il ne vous la fera pas à l’envers. Bon gars, bon esprit, bonne personne, bon coéquipier.”
Puis, après avoir parlé de ses coéquipiers et de Melo, c’est Phil Jackson qu’évoque Derrick :
“Je ne dis pas grand chose, mais Phil pourrait en parler. Phil me disait d’être patient. Il me disait que j’avais beaucoup à faire avec le procès et tout le reste. Il a été honnête avec moi. A chaque fois qu’il me parlait, il était honnête, je dirais ça. Cependant, notre relation était un peu bizarre. Il était cool tout le temps où j’étais là, mais il voulait les 60 millions qu’il devait aux Knicks. Quant à moi, j’aimais bien Phil, mais voyons, tu continues de prôner le jeu en triangle? Il était sans cesse en train de nous forcer à le jouer. Je suis un slasher, un meneur de jeu qui attaque le cercle. Le triangle est correct, mais pas pour l’effectif que nous avions. Melo ne pouvait pas jouer de cette façon, il ne le voulait pas.”
Le MVP 2011 continue ensuite à parler de ses ambitions à New York qui se sont avérées n’être qu’illusions :
“Avec mon départ de Chicago, j’étais vraiment impatient de jouer, je voulais vraiment faire quelque chose. New York, avec Jo, Phil et Melo en plus de quitter Chicago, cela sonnait comme quelque chose qui allait être spécial. Se remettre à gagner. J’avais des attentes élevées, et je voulais performer. J’ai senti l’étincelle. Mais nous n’avons jamais eu d’alchimie, ni en attaque et ni en défense. J’ai le sentiment que nous ne faisions pas les choses supplémentaires pour gagner un match, se battre sur une action ou faire l’extra pass. Nous avons joué de nombreux matchs où nous atteignons un point où tout s’effondrait. Nous avons eu un bon début, presque 50% de victoires en Décembre, mais on pouvait voir que la situation s’empirait. Nous savions que ce n’était qu’une question de temps. De cette manière, et surtout à l’Est, une équipe comme celle là peut rivaliser, avec de tels talents. Ils (les Knicks) essayaient de le faire pour Melo. Lui ne voulait pas recommencer à zéro donc ils voulaient des vétérans autour de lui. Mais il ne peut pas jouer avec beaucoup de gars, et il doit être le Franchise Player. Nous étions supposés être une équipe du top 5. Vous devriez juste enchaîner les victoires avec autant de talents, mais nous luttions pour être dans le match à la mi-temps. C’était frustrant, mais dans le même temps, tout était hors de notre contrôle. Jo’ et moi en parlions tout le temps. Phil voulait que nous jouions d’une certaine façon et nous devions écouter. Que pouvez-vous faire?”
Enfin, Derrick conclut en faisant le bilan de son aventure controversée aux Knicks, dont il garde tout de même un bon souvenir :
“J’ai tout de même vraiment aimé mon expérience à New York. C’est un endroit cool. Avec la manière dont les choses se passaient les dernières années à Chicago, je savais que j’avais besoin d’une pause. Quand j’ai quitté les Knicks ce jour là en 2017 (lorsque Derrick sèche un match des Knicks en janvier 2017, ndlr), c’était de ça qu’il s’agissait. J’avais juste besoin de rentrer chez moi. Je suis allé chez ma mère. Tout le monde est venu à la maison pour parler. C’était la première fois – et une des rares fois – que nous nous réunissions en famille pour avoir une discussion sérieuse comme celle-ci. J’avais décidé d’arrêter de jouer. Je voyais les mêmes choses qui se passaient chez les Bulls en train de se produire à New York. Je peux vous dire que la saison n’était pas la saison à laquelle tout le monde s’attendait, à laquelle je m’attendais. Je ne savais plus si je voulais continuer à mettre des paniers. Surtout quand ça a commencé à être un business. Bien sûr, on sait que c’est un business, ils disent toujours ça. Mais c’est aussi jouer au basket. Et ça commençait à ne ressembler qu’à un business, sans joie. C’est à ce moment que j’ai voulu arrêter. Je ne m’amusais plus”